« Nature ne nous fait esclaves d’un espoux » : quelques réflexions sur la nature dans Hippolyte de Robert Garnier (1573)

Si sa réécriture de Phaedra de Sénèque a longtemps été considérée comme une pure – et servile – imitation, Robert Garnier s’éloigne pourtant à maintes reprises de sa source et propose plusieurs passages originaux. Parmi eux, un dialogue a particulièrement interrogé la critique : lorsque sa Nourrice lui reproche d’avoir conçu un amour adultère et incestueux pour son beau-fils, Phèdre se réclame de l’exemple du règne animal pour justifier d’outrepasser les règles ordinaires du mariage et de la famille, et en tire même des revendications libertaires sur le statut social des femmes (« Nature ne nous fait esclaves d’un espoux »). La critique a pu voir dans ces vers l’expression d’un féminisme ou au contraire d’une misogynie de Garnier. Nous reviendrons sur cette question mais interrogerons surtout la vision de la nature qui se dégage des propos de Phèdre : le règne animal peut-il bien être un modèle pour l’humain, ou ne l’est-il que pour la désordonnée marâtre ? Que penser alors d’Hippolyte, prince héritier mais aussi chasseur qui délaisse la cité pour les bocages et forêts ? Autant de questions que nous poserons en examinant la pièce de Garnier mais également d’autres textes, politiques et théoriques, de l’époque, pour interroger plus largement la vision de la nature dans la tragédie de la Renaissance.

Nina Hugot, agrégée de Lettres modernes, est maîtresse de conférences à l’université de Lorraine depuis 2019. Si elle s'est d'abord intéressée aux deux tragédies d'Étienne Jodelle, ses travaux se consacrent plus largement au genre tragique dans la France de la Renaissance et interrogent notamment le rôle des personnages de femmes et du féminin dans l’élaboration de l’esthétique tragique au XVIe siècle.

Date(s)
Lieu
Université de Lorraine - salle D 206, Batiment SHS, 2e étage | 18h15
Organisateur(s)
Nina Hugot (Université de Lorraine, Ecritures)