Roman francophone et histoire. Renouvellement des formes d’écriture littéraire de l’événement historique
Journée d'études doctorales
Les écrivains issus de pays autrefois colonisés ont forgé des écritures spécifiques pour dire l’histoire passée (fait colonial, guerres de décolonisation, etc.). Observateurs d'une forme de continuation du passé dans le présent (événements post-coloniaux tels que guerre du Rwanda, séquelles matérielles et psychiques héritées du passé colonial …), les différentes formes qu’ils donnent à leur écriture de l’histoire soulèvent des enjeux poétiques. Cette journée d’études doctorale se penchera donc sur les nouvelles élaborations textuelles et constructions discursives pour dire cette réalité vécue (et ces observations). Il s’agira d’explorer notamment les formes d’écriture que l’écrivain africain francophone utilise pour restituer, figurer l’événement historique.
L’écriture de l’événement historique pratiquée par des romanciers comme Assia Djebar, Tierno Monénembo, Kossi Efoui, Abdourahman A. Waberi, Rachid Boudjedra, Alain Mabanckou, Anouar Benmalek et autres donne en effet à lire une histoire en partage entre les sujets de l'histoire des anciennes métropoles et des anciennes colonies. Leur renouvellement des formes d’écriture de l’histoire s’illustre à la fois comme la construction d’une compréhension commune à l’ensemble des héritiers du fait colonial, et comme une insistance sur le fait que les traces de cette histoire continuent de hanter notre présent.
Leur écriture rend au présent l'expérience vécue et met en évidence les traces toujours vives de l'histoire passée. Imbrications des temps, jeux sur les mises en page, sur les mots, polyphonie, intertextes, citation, etc. sont autant de moyens par lesquels l’écriture de ces romanciers africains francophones reprend le récit du fait colonial dans ses liens avec notre présent.
L’ensemble de ces procédés utilisés pourraient être ceux de « fictions pensantes » telles que Franck Salaün les définit, c’est-à-dire comme des fictions qui « embarquent le lecteur dans une sorte d’aventure intellectuelle […] en signalant au promeneur quelques sites intéressants, et aux autres orpailleurs les cours d’eau et les sables aurifères » (Franck Salaün, 2013). A travers les différents procédés littéraires utilisés, leur écriture semble développer une pensée de l’histoire. C’est ainsi que leurs écritures de l’histoire travaillent le présent en l’investissant d’éléments du passé. L’écriture enferme peut-être, par cette mise en relation du présent avec le passé, l’objectif de rapprocher de nous lecteurs, « ce qui semblait éloigné de nous » (Kossi Efoui, 2013).
Programme
08h30 Accueil des participants
09h00 Présentation, introduction
Écriture et réception : élargir la compréhension historique des lecteurs
09h15 Maha SMATI, Université de Louvain
« Histoire officielle, réalités officieuses : la fiction algérienne investie du dehors »
09h35 Discussion
09h45 Farid NAMANE, Université de Lorraine
« La "guerre d’Algérie" dans le roman policier : le cas de La part du Mort de Yasmina Khadra »
10h05 Discussion
10h15 Jaroslav STANOVSKÝ, Universités Paris-Est/Masaryk de Brno
« Œuvre littéraire comme une structure dynamique : pour l’analyse fonctionnelle de la fiction historique »
10h35 Discussion
10h45 Pause-café
Écrire et interroger l’histoire
11h00 Alice DESQUILBET, Université Paris III-Sorbonne Nouvelle
« Sony Labou Tansi et le motif du trou, du symbole de l’histoire coloniale à la métaphore extractiviste »
11h20 Discussion
11h30 Céline RICHARD, Université Paris-Sorbonne
« "Les larmes de la lune" (Scholastique Mukasonga). Témoigner du génocide ou de l’extermination, même par l’écriture poétique : exprimer le deuil, la terreur et la désolation pour interroger l’Histoire
11h50 Discussion
12h00 Philippe Herman SANON, Université de Strasbourg
« Explorer à travers l’écriture romanesque les formes d’accueil ou/et de rejet par les Africains du christianisme prêché par les missionnaires à l’époque coloniale »
12h20 Discussion
12h30 Pause-déjeuner
Écrire les non-dits, les manques, les absences
14h30 Rocio MUNGUIA AGUILAR, Université de Strasbourg
« Écrire autour du silence : traite interne et esclavage dans La Saison de l’ombre de Léonora Miano »
14h50 Discussion
15h00 Bo-Hyun KIM, Université de Strasbourg
« Proposition d’une nouvelle lecture temporelle de l’écriture de métissage lopésienne »
15h20 Discussion
15h30 Pause-café
15h45 Soukaïna ELMOUDDEN, Université de Nantes/Kénitra
« L’histoire autrement écrite dans Léon l’Africain d’Amin Maalouf »
16h05 Discussion
16h15 Milunda KOMBILA, Université de Lorraine
« Périodiques culturels et structuration du champ: le cas de Peuples noirs, peuples africains (1978 -1991) »
16h35 Discussion
17h15 Café, clôture de la journée, remerciements