Pascal MACQUET
Au XVIe siècle, de nouveaux genres théâtraux apparaissent en France, portés par le projet humaniste, et remplacent progressivement les formes du théâtre médiéval. C’est à cette période que débute l’histoire française de la tragédie, de la comédie et de la pastorale dramatique. À ce moment, de nombreux dramaturges, auteurs de tragédies, écrivent également des pastorales. Notre hypothèse est que de nombreux jeux d’échos existent entre ces deux genres dramatiques. Ainsi, en 1566, ce qui est considéré comme la première pastorale dramatique humaniste française, Les Ombres de Nicolas Filleul, débute avec ces deux alexandrins : « Ceste douce saison Thyrsis, me renouvelle / Le gentil souvenir de la playe cruelle ». Dès ses premiers instants en français, le genre associe le cadre bucolique dans lequel va se dérouler l’intrigue, et les souffrances des personnages qui seront représentées. La question à laquelle entendra répondre notre travail est alors la suivante : la pastorale dramatique française, se construit-elle en rapport direct avec la tragédie ? Si oui, de quelle nature seraient les rapports unissant les deux genres, et quelles conséquences ont-ils sur la définition de la pastorale ? Nous considérerons le corpus des premières années des pastorales dramatiques humanistes (entre 1566 et 1601, des Ombres de Filleul à La Bergerie de Montchrestien) sous l’angle de l’étude de la tension entre la distance idyllique qui forme le sujet des pastorales (en cela que ces pièces mettent toutes en scène des histoires d’amours supposément idéales dans un cadre bucolique) et les schèmes tragiques que les dramaturges exploitent dans la construction dramaturgique de leurs textes. L’objectif sera de jeter un regard neuf sur la manière dont se construit la pastorale au théâtre au XVIe siècle, genre dramatique dont la dernière étude d’ensemble date de 1905.