Dimension critique de l’intermédialité

Dimension critique de l’intermédialité

 

vendredi 24 juin 2022

Laboratoire Écritures (UR 3943)

Université de Lorraine (salle Ferrari, site du Saulcy, Metz)

 

PROGRAMME

9h30 Accueil

9h45 Introduction par l’équipe organisatrice

10h Lise Lerichomme – UR CRAE – université de Picardie Jules Verne « L’installation comme hypotypose ? Almées, Moniales et Spirites absentes »

11h Bruno Trentini – UR Écritures – université de Lorraine « Et si l’œuvre d’art exemplifiait des propriétés relationnelles ? À propos du spectre de l’anti-théâtralité des arts plastiques »

12h Pause déjeuner

14h Emma Merabet – Passages XXe -XXIe – université Lyon 2 « Une installation-chorégraphique, des paysages post-anthropocentriques : la réalité inséparée d’ORA (Orée) de Vania Vaneau »

15h Claudia Blouin – université Laval, Québec « Corps-à-corps avec la laine : investir le chiasme intersensoriel à travers les devenirs des corporéités et de la matière »

16h Discussion et clôture

 

La journée d’étude « Dimension critique de l’intermédialité » – premier événement du projet de recherche « Décloisonner les arts plastiques et scéniques » – est née du constat que les arts scéniques et les arts plastiques semblent de plus en plus s’emprunter les uns aux autres des stratégies artistiques : l’objet s’immisce peu à peu sur scène ; la théâtralité s’empare des arts visuels. Même s’il l’a étudié en le déplorant, Mickael Fried a pointé avec précision la manière dont les peintures et les sculptures commençaient à jouer avec le spectateur, recréant de ce fait la structure scène/salle chère au théâtre. Les différentes formes des œuvres plastiques contemporaines (interactives, relationnelles, participatives etc.) ont continué ce mouvement montrant de plus en plus la facilité que le champ des arts plastiques a à abandonner le paradigme du chef d’œuvre. De son côté, le théâtre fait un pas vers les arts plastiques en repensant la place de l’objet sur scène affaiblissant de ce fait la parenté originelle qui reliait le théâtre à la littérature. Pour déployer son analyse du théâtre postdramatique, le théoricien allemand Hans-Thies Lehmann partait du constat, que depuis les années 1980, le nouveau texte de théâtre est souvent un texte qui n’est plus dramatique et qu’il devient un élément parmi les autres langages gestuels, musicaux et visuels de la représentation. Le décentrement du texte semble aujourd’hui de plus en plus être supplanté par le décentrement de l’humain au sein d’un théâtre post-anthropocentrique[1].

Suivant le point de vue que l’on adopte, ce constat peut être interprété comme menant à une fusion des deux arts ou, à l’opposé, à un renversement des stratégies de ces formes d’art puisque l’un abandonne l’objet quand l’autre se l’approprie. L’hypothèse que propose d’étudier cette journée est encore autre : et si ces échanges étaient en fait le symptôme d’un mouvement plus global que les arts scéniques et plastiques entreprennent ensemble pour déconstruire des traditions encore fortement attachées aux différentes formes d’art ? L’intermédialité ne serait alors qu’accidentelle : ce qui compte serait davantage que les arts plastiques abandonnent une relation à l’objet qui les enfermait trop fermement dans des logiques de production – qui plus est marchandes – au moment d’un tournant écologique où la production n’est plus accueillie d’un bon œil ; ce qui compte serait davantage que les arts scéniques abandonnent une relation au Verbe et à l’humain qui les ancrait trop fortement dans un contexte anthropocentré au moment du même tournant écologique où on réinterroge la place de l’humain parmi l’animal et les autres genres du vivant. L’accroissement de l’importance accordée aux éléments visuels de la représentation et de son hybridation grâce à l’utilisation, entre autres, de la photographie ou de la vidéo au théâtre ne date pas d’hier. Mais les dispositifs scéniques très visuels se renouvellent récemment notamment grâce à la présence d’animaux ou d’objets sur les scènes considérés comme des actants. Sans exhaustivité, on peut citer les travaux de Philippe Quesne, Mette Ingvartsen, Rimini Protokoll, David Weber-Krebs, Clédat et Petitpierre.

Autrement dit, c’est parce que les trajectoires des arts plastiques et des arts scéniques diffèrent qu’ils peuvent suivre une voie parallèle tout en donnant l’impression de s’interpénétrer. Cette voie parallèle conduit de plus en plus à la création d’objets artistiques inclassables, comme des installations performatives qui trouvent autant leur place dans des musées que dans des théâtres. Qu’il s’agisse de la mise en scène des non-humains, ou de l’expérience partagée qui fait œuvre, l’intermédialité serait accompagnée de réflexions communes comme celle provoquée par le « réinvestissement de l’animisme[2] » telle une « une catégorie politique d’action par laquelle collectivement se construit de quoi penser et agir[3] » ainsi que par les théories et débats autour de l’anthropocène.

 

C’est dans ce cadre théorique que les propositions de cette journée d’étude peuvent s’inscrire étudiant alors les stratégies déployées par les arts scéniques et plastiques pour contrevenir et échapper à une tradition trop lourde à porter au regard des tournants écologiques et post-anthropocéniques.

 

Comité d’organisation

Virginia de la Cruz Lichet, université de Lorraine (virginie.de-la-cruz@univ-lorraine.fr)

Bruno Trentini, université de Lorraine (bruno.trentini@univ-lorraine.fr)

Marie Urban, université de Lorraine (marie.urban@univ-lorraine.fr)

 

Envoi des propositions de communication

Les propositions (titre et résumé de 250 mots) sont à envoyer au comité d’organisation avant le 7 avril 2022.

 

Bibliographie indicative

ARDENNE, Paul, Un art contextuel. Création artistique en milieu urbain, en situation, d’intervention, de participation, Paris, Flammarion, 2002.

ARDENNE, Paul, Un art écologique. Création plasticienne et anthropocène, Le Bord de l’Eau, Lormont, 2018.

ARFARA, Katia, Théâtralités contemporaines : entre les arts plastiques et les arts de la scène, Berne, Peter Lang, 2011.

BAUDRILLARD, Jean, Le Système des objets, Paris, Denoël/Gonthier, 1972.

BISHOP, Claire, Artificell hells, Participatory Art and the Politics of Spectatorship, London, New York, Verso, 2012.

BOURRIAUD, Nicolas, Postproduction. La culture comme scénario : comment l’art reprogramme le monde contemporain, Dijon, Les presses du réel, 2003.

DAMIAN, Jérémy, « Weird animisms », in Ré-animation, Corps-objet-image, numéro 3, TJP Éditions, 2018

DORT, Bernard, La Représentation émancipée, Arles, Actes Sud, coll. « Le Temps du théâtre », 1988.

FISCHER-LICHTE, Erika, Ästhetik des Performativen, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 2004.

FRIED, Michael, La Place du spectateur. Esthétique et origine de la peinture moderne, Paris, Gallimard, 1990.

FRIED, Michael, Contre la théâtralité. Du minimalisme à la photographie contemporaine, Paris, Gallimard, coll. « NRF Essais », 2007.

HACHE, Émilie (dir.), De l’univers clos au monde infini, Bellevaux, Éditions Dehors, 2014.

HELBO, André ; BOUKO, Catherine ; VELINDEN, Élodie (dir.), Interdiscipline et arts du spectacle vivant, Paris, Honoré Champion, 2013.

LARRUE, Jean-Marc (dir.), Théâtre et Intermédialité, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires de Septentrion, 2015, p. 133-147.

LATOUR, Bruno, Où atterrir ? Comment s’orienter en politique, La Découverte, Paris, 2017

LEHMANN, Hans-Thies, Le Théâtre postdramatique, Paris, l’Arche, 2002.

TOUDOIRE-SURLAPIERRE, Frédérique ; FIX, Florence (dir.), Un théâtre en quête d’espaces ? Expériences scéniques de la limite, Dijon, Universitaires de Dijon, coll. « Écritures », 2014.

 

[1]. LEHMANN, Hans-Thies, Le Théâtre postdramatique, Paris, L’Arche, 2002, p. 127.

[2]. DAMIAN, Jérémy, « Weird animisms », in Ré-animation, Corps-objet-image, numéro 3, TJP Éditions, 2018, p. 9.

[3]. Ibid., p. 10.

Date(s) début - fin
Lieu
Université de Lorraine - Metz - Campus Saulcy - Salle Ferrari
Organisateur(s)
Virginia de la Cruz Lichet, Bruno Trentini, Marie Urban
Pièce(s) jointe(s)