La forme de l’aphorisme est particulièrement récurrente dans l’oeuvre d’André Gide, dans son Journal, voire sa correspondance, comme dans ses oeuvres de fiction, romans, récits ou soties, qui sont appelés à constituer le corpus de cette thèse. Dans le cas de Gide, le recours à la forme de l’aphorisme pose une série de questions convergentes, qui relèvent aussi bien de la poétique des genres que de la stylistique et de l’histoire littéraire, telle que la sociologie de la littérature nous invite aujourd’hui à la repenser. L’aphorisme gidien, qui fait résonner le souvenir de ces lectures classiques, en particulier, engage non seulement la question de la culture littéraire de son auteur, mais aussi celle de son appropriation et même de son détournement par l’écrivain : dans la thèse, c’est la question du dialogue de Gide avec la culture classique et de ses enjeux, à la fois éthiques et idéologiques, qui sera plus particulièrement envisagée. L’usage de cette forme, le lien qu’elle permet d’établir entre ce qui relève de l’écriture de soi et ce qui relève de l’écriture fictionnelle, engagent à réfléchir sur la place occupée par l’aphorisme dans cette dernière. L’analyse de cette forme, d’un point de vue rhétorique et stylistique, mais aussi narratologique, doit donc conduire à s’interroger sur la double fonction de l’aphorisme, esthétique et idéologique, dans les fictions de Gide. Dans la mesure où le recours à une forme comme l’aphorisme est paradoxale, dans l’oeuvre d’un auteur qui cultive une éthique de l’art pur, l’analyse rhétorique et stylistique ne peut donc se dispenser d’une prise en compte rigoureuse du contexte et de la position littéraire de Gide : elle doit ainsi aider à mieux comprendre certaines ambiguïtés de son positionnement dans le champ littéraire de son époque.