"Continuité de la personne et action divine : proposition d’une anthropologie théologique à partir des philosophies anglophones de la nature et de l’esprit "
Marc Bellion
Directeur(s) de thèse
Jacques Fantino (UL), Brigitte Cholvy (ICP), Anthony Feneuil (UL)
Composition du jury

M. Jacques FANTINO Université de Lorraine Directeur de thèse

Mme Veronika HOFFMANN Université de Fribourg Rapporteure

M. Dominique LAMBERT Université de Namur Rapporteur

M. Jean-François PETIT Institut Catholique de Paris Examinateur

Mme Brigitte CHOLVY Institut Catholique de Paris Co-directrice de thèse

M. Anthony FENEUIL Université de Lorraine Co-directeur de thèse

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Résumé

Cette thèse en théologie a pour sujet la personne humaine et sa continuité. La recherche porte sur la personne humaine dont nous cherchons à exprimer la continuité à travers les différentes phases de son existence. L’existence s’entend ici au sens d’existence d’un individu humain, telle qu’elle est comprise en théologie chrétienne, incluant donc ce qui se passe après la mort et à la résurrection. Pour la phase terrestre, il s’agit de l’existence de la personne qui va de sa conception à sa mort. Par rapport à ce qui se passe après la mort, la recherche établit qu’une existence individualisée et active est alors possible, mais selon une autre modalité. Notre ligne de recherche suit donc le fil de l’existence de la personne selon ces différentes modalités. Cela explique que l’exposé ne se présente pas selon un ordre plus habituel en anthropologie théologique : la condition de l’homme créé initialement par Dieu, la condition marquée par le péché et la mort, la condition sauvée par le don de la grâce. La perspective de travail adoptée est celle de la continuité de la personne, une continuité articulée à l’action divine et orientée vers l’accomplissement de la personne à la résurrection des morts. L’étude veut montrer que la problématique de la continuité de la personne est déjà présente dans les textes bibliques et dans l’histoire de la théologie, principalement contemporaine. Elle exprime ensuite cette problématique à l’aide d’outils de conceptualisation contemporains. En effet, cette question a été traitée par certains auteurs qui, même si leurs positions peuvent être différentes, manifestent dans leur ensemble que la problématique de la continuité de la personne s’inscrit dans le champ théologique contemporain. Ce qui vient d’être dit éclaire la manière dont nous l’étude a été organisée. Le premier chapitre pose les fondements théologiques. Il élabore une définition théologique de la personne humaine comme un être vivant créé par Dieu à son image et à sa ressemblance, nommé et appelé par lui à vivre une vie en plénitude. L’image est considérée comme l’ensemble des dispositions au sein de la personne qui lui permettent de ressembler, par son comportement dans le monde, de plus en plus à Jésus-Christ, image parfaite de Dieu. Ce chapitre s’intéresse ensuite à Jésus-Christ qui constitue l’unique exemple de quelqu’un dont la continuité au-delà de sa mort est affirmée. Cette affirmation est au cœur de la foi chrétienne. Les quatre notions d’image, de ressemblance, d’appel et de nomination, ont permis d'élaborer un modèle anthropologique développé dans la suite de l’étude. Les autres chapitres examinent la continuité de la personne en lien avec l’action divine selon les différentes étapes reconnues par la théologie chrétienne. La première concerne la vie terrestre (chapitre 2). Le concept d’émergence, tant en philosophie de la nature qu’en philosophie de l’esprit, y joue un rôle central. Ensuite, la recherche se poursuit en étudiant la continuité de la personne au moment de la mort et de ce qui la suit (chapitre 3). Dans ce chapitre, est introduite la philosophie de l’information qui constitue un appui essentiel pour exprimer ce qu’est la personne et sa continuité après la mort. Pour terminer, le travail porte sur la continuité de la personne à la résurrection et dans la vie qu’elle instaure, celle de la création nouvelle (chapitre 4). L’anthropologie exprimée avec les concepts théologiques d’image, ressemblance, appel et nom trouve avec le modèle qui a été élaboré grâce à eux une explicitation et une compréhension élargie avec les notions d’émergence et d’information. Parler de la personne humaine, corps et esprit, dans cette perspective permet ainsi de rejoindre les questions des contemporains sur ce qu’est la personne humaine et son devenir. La conception anthropologique développée à l’aide de ce modèle ouvre des perspectives pour des réalisations pratiques en pastorale ou des recherches ultérieures.

En téléchargement
"Traduction et commentaire du De Resurrectione de Méthode d'Olympe "
Marie-Noëlle Vignal
Directeur(s) de thèse
Marie-Anne Vannier (UL)
Composition du jury

NC

Résumé

Ce sujet de thèse consiste en un commentaire du  « De resurrectione », traité composé sous la forme d’un dialogue platonicien par Méthode d’Olympe, théologien du IIIe siècle.  Les personnages mis en scène dans ce dialogue s’entretiennent sur la question très controversée de la résurrection des corps et s’efforcent de répondre à ce  problème d’une grande complexité : est-ce avec le corps matériel et corruptible qui est le nôtre que nous ressusciterons ? Deux de ces personnages, Aglaophon et Proclus développent les thèses origéniennes, réfutées avec force par leurs adversaires, Eubule et Memian, tentant d’établir la doctrine traditionnelle. L’objectif de ce travail est de montrer que la réflexion sur le dogme de la résurrection, chez Méthode, s’inscrivant dans le grand débat suscité par les thèses d’Origène, entretient un rapport étroit avec la notion de personne humaine. Nous expliquerons en premier lieu comment notre auteur s’attache à sauvegarder l’identité du corps mortel et du corps ressuscité, mise en péril par le discrédit dans lequel le théologien alexandrin tient le corps et la primauté qu’il donne à l’âme. Voulant défendre avec ardeur le principe de l’unité de l’homme, Méthode prend ses distances envers les philosophies dualistes auxquelles adhère son adversaire. Nous en viendrons à aborder le problème des origines philosophiques de la pensée d’Origène et nous interrogerons sur d’éventuelles influences gnostiques. Nous privilégierons les axes suivants : la pensée d’Origène sur la matière, le corps et l’âme, la notion d’eidos, les arguments d’ordre scientifique, théologique, christologique et scripturaire sur lesquels s’appuie Méthode. On se heurte alors à un problème délicat car l’évêque d’Alexandrie cherche un mode de résurrection en accord avec les exigences légitimes de la raison et la tradition chrétienne. D’où les éclaircissements à apporter sur les termes désignant  la forme, appliqués au corps dans l’ensemble de son œuvre : eidos, morphè et schema. Il n’est pas certain que Méthode ait dégagé le sens philosophique que leur attribue Origène. Finalement ce traité traduit l’embarras des penseurs chrétiens partagés entre une vision dualiste de l’homme, transmise par des courants de pensée imprégnés de Platon et  la philosophie d’Aristote présentant peut- être certaines analogies avec l’anthropologie hébraïque. Nous voudrions mettre en lumière la résonance des idées défendues par l’évêque d’Olympe sur les Pères des siècles postérieurs : au IVe siècle, Epiphane de Salamine, qui reprend les actes d’accusation de Méthode, Grégoire de Nysse, insistant lui aussi, sur la possibilité de la restauration de notre corps terrestre, grâce à la toute- puissance divine. Nous pouvons percevoir chez Cyrille d’Alexandrie, au Ve siècle, un acharnement à sauver l’intégrité de la personne humaine dans la résurrection, proche de celui de Méthode.  Comme son prédécesseur, il condamne la croyance d’Origène à la préexistence des âmes et les erreurs de ce dernier sur la résurrection. Parmi les Pères latins, nous nous intéresserons à Saint Augustin : afin de répondre aux difficultés soulevées par les hérétiques, il exprime les mêmes vérités fondamentales : l’homme est un tout, le salut s’adresse au corps et à l’âme, la résurrection sera pour le corps le retour à la perfection prélapsaire.
Nous étendrons enfin nos recherches aux théologiens du Moyen Âge, tout particulièrement à ceux du XIIIe siècle : Jean de la Rochelle, Saint Bonaventure et Saint Thomas. Là encore, dans l’anthropologie élaborée par ces philosophes, héritée d’Aristote, on peut discerner la ferme volonté d’affirmer l’unité naturelle de l’âme et du corps, face à des opposants professant la distinction platonicienne des deux principes. Nous trouvons un écho de ces deux courants et donc des deux grandes conceptions de l’homme qui s’affrontent depuis l’époque de Méthode d’Olympe : celle de Platon et du Néoplatonisme,  réduisant l’homme à une âme revêtue d’un corps, et celle d’Aristote assurant que l’âme ne possède d’être individuel que jointe au corps. Il nous semble particulièrement intéressant que saint Thomas appuie sa démonstration sur des passages des Écritures examinés par Méthode d’Olympe dans le « De resurrectione », qu’il analyse les mêmes objections opposées à l’intégrité du corps ressuscité, et qu’il considère lui aussi, le refus de la résurrection de la personne humaine dans sa totalité comme une hérésie. Nous souhaiterions que cette recherche permette de mesurer l’apport considérable de ce Père de l’Église, peu connu dans l’histoire de la Patristique, au dogme de la résurrection, objet de si nombreuses controverses.