" Traduction et commentaire du De Resurrectione de Méthode d'Olympe "
Marie-Noëlle Vignal
Directeur(s) de thèse
Marie-Anne Vannier (UL)
Composition du jury

NC

Résumé

Ce sujet de thèse consiste en un commentaire du  « De resurrectione », traité composé sous la forme d’un dialogue platonicien par Méthode d’Olympe, théologien du IIIe siècle.  Les personnages mis en scène dans ce dialogue s’entretiennent sur la question très controversée de la résurrection des corps et s’efforcent de répondre à ce  problème d’une grande complexité : est-ce avec le corps matériel et corruptible qui est le nôtre que nous ressusciterons ? Deux de ces personnages, Aglaophon et Proclus développent les thèses origéniennes, réfutées avec force par leurs adversaires, Eubule et Memian, tentant d’établir la doctrine traditionnelle. L’objectif de ce travail est de montrer que la réflexion sur le dogme de la résurrection, chez Méthode, s’inscrivant dans le grand débat suscité par les thèses d’Origène, entretient un rapport étroit avec la notion de personne humaine. Nous expliquerons en premier lieu comment notre auteur s’attache à sauvegarder l’identité du corps mortel et du corps ressuscité, mise en péril par le discrédit dans lequel le théologien alexandrin tient le corps et la primauté qu’il donne à l’âme. Voulant défendre avec ardeur le principe de l’unité de l’homme, Méthode prend ses distances envers les philosophies dualistes auxquelles adhère son adversaire. Nous en viendrons à aborder le problème des origines philosophiques de la pensée d’Origène et nous interrogerons sur d’éventuelles influences gnostiques. Nous privilégierons les axes suivants : la pensée d’Origène sur la matière, le corps et l’âme, la notion d’eidos, les arguments d’ordre scientifique, théologique, christologique et scripturaire sur lesquels s’appuie Méthode. On se heurte alors à un problème délicat car l’évêque d’Alexandrie cherche un mode de résurrection en accord avec les exigences légitimes de la raison et la tradition chrétienne. D’où les éclaircissements à apporter sur les termes désignant  la forme, appliqués au corps dans l’ensemble de son œuvre : eidos, morphè et schema. Il n’est pas certain que Méthode ait dégagé le sens philosophique que leur attribue Origène. Finalement ce traité traduit l’embarras des penseurs chrétiens partagés entre une vision dualiste de l’homme, transmise par des courants de pensée imprégnés de Platon et  la philosophie d’Aristote présentant peut- être certaines analogies avec l’anthropologie hébraïque. Nous voudrions mettre en lumière la résonance des idées défendues par l’évêque d’Olympe sur les Pères des siècles postérieurs : au IVe siècle, Epiphane de Salamine, qui reprend les actes d’accusation de Méthode, Grégoire de Nysse, insistant lui aussi, sur la possibilité de la restauration de notre corps terrestre, grâce à la toute- puissance divine. Nous pouvons percevoir chez Cyrille d’Alexandrie, au Ve siècle, un acharnement à sauver l’intégrité de la personne humaine dans la résurrection, proche de celui de Méthode.  Comme son prédécesseur, il condamne la croyance d’Origène à la préexistence des âmes et les erreurs de ce dernier sur la résurrection. Parmi les Pères latins, nous nous intéresserons à Saint Augustin : afin de répondre aux difficultés soulevées par les hérétiques, il exprime les mêmes vérités fondamentales : l’homme est un tout, le salut s’adresse au corps et à l’âme, la résurrection sera pour le corps le retour à la perfection prélapsaire.
Nous étendrons enfin nos recherches aux théologiens du Moyen Âge, tout particulièrement à ceux du XIIIe siècle : Jean de la Rochelle, Saint Bonaventure et Saint Thomas. Là encore, dans l’anthropologie élaborée par ces philosophes, héritée d’Aristote, on peut discerner la ferme volonté d’affirmer l’unité naturelle de l’âme et du corps, face à des opposants professant la distinction platonicienne des deux principes. Nous trouvons un écho de ces deux courants et donc des deux grandes conceptions de l’homme qui s’affrontent depuis l’époque de Méthode d’Olympe : celle de Platon et du Néoplatonisme,  réduisant l’homme à une âme revêtue d’un corps, et celle d’Aristote assurant que l’âme ne possède d’être individuel que jointe au corps. Il nous semble particulièrement intéressant que saint Thomas appuie sa démonstration sur des passages des Écritures examinés par Méthode d’Olympe dans le « De resurrectione », qu’il analyse les mêmes objections opposées à l’intégrité du corps ressuscité, et qu’il considère lui aussi, le refus de la résurrection de la personne humaine dans sa totalité comme une hérésie. Nous souhaiterions que cette recherche permette de mesurer l’apport considérable de ce Père de l’Église, peu connu dans l’histoire de la Patristique, au dogme de la résurrection, objet de si nombreuses controverses.