Ce travail analyse les enjeux d'une narration disloquée en rapport avec la mémoire de la guerre dans le roman contemporain de langue française, sur la base d’une approche narratologique. Le corpus comporte cinq romans : Le Message d’Andrée Chedid, Riz noir d’Anna Moï, Le Boulevard périphérique de Henry Bauchau, L’Horizon de Patrick Modiano et Les Désorientés d’Amin Maalouf, tous publiés au xxie s. Le choix de ce corpus international (France, Liban, Belgique, Vietnam) est en partie inspiré par le concept de « Littérature-monde ». En référence à quatre conflits différents, notre étude s’intéressera plutôt à l’impact tragique de la guerre en général sur des œuvres qui, tout en relevant de l’extrême-contemporain, se souviennent du xxe siècle. L’analyse étudiera la manière dont l'auteur travaille littérairement le traumatisme de la guerre, ce qui l’amène à produire des formes de narration disloquée, subissant les hésitations et les obsessions d'une mémoire intermittente, et, contradictoirement, à recomposer des formes unifiantes pour aboutir à une œuvre (ce qui se joue à la fois au niveau éthique et esthétique). La première partie se concentrera sur les mutations socio-historiques du tournant du xxie siècle et sur la perception d’un monde éclaté, spécialement dans le domaine romanesque. La deuxième partie, essentiellement narratologique, étudiera les romans considérés en tant qu’écritures mémorielles et y examinera les phénomènes de dislocation narrative. La troisième partie sera consacrée aux systèmes unificateurs destinés à recomposer une Histoire tragique et à leurs enjeux ; ceci nous amènera à évoquer les aspects axiologiques des romans afin d'étudier leur dimension éthique. C’est ici que la notion de littérature-monde sera réévaluée.

Le livre du prophète Jérémie, situé à une époque particulièrement structurante et problématique de l’histoire d’Israël, réunit des formes littéraires différentes : oracles en prose ou en poésie, récits, discours à la première personne… L’exégèse classique, portée surtout à reconstruire l’histoire de la rédaction en fonction des circonstances historiques,  ne rend pas suffisamment compte de cet état final du texte. L’herméneutique contemporaine (notamment P. Ricœur) invite à une autre approche : le lecteur ne reçoit pas seulement un message de ce qui est explicitement identifié comme « parole de YHWH » ou « oracle de YHWH », mais aussi en se laissant travailler par le récit et l’organisation du livre. Il y a donc à examiner et à penser le rapport entre oracles et narration dans le livre de Jérémie. Cela soulève des questions théologiques. Ainsi l’ « inspiration » ne se réduit pas à l’inspiration initiale du prophète historique, mais s’ouvre au processus d’élaboration du livre tel qu’il nous est parvenu. Se pose de même la question de la révélation dans l’histoire, face à un livre qui met en scène la « parole de YHWH » dans un récit.

Les premiers travaux ont consisté en une étude précise de quelques passages du Livre de Jérémie, chacun illustrant une manière particulière d’insérer un oracle dans un récit : Jr 13, 1-11  (le pagne); 14,1-9 (la sécheresse); 37,3-16 (oracle conduisant à l’arrestation); 42,1–43,7 (oracle lors de la fuite en Egypte). La recherche s’oriente désormais vers l’étude du rôle des oracles comme éléments de construction des personnages.