Safa BEN KHEDHER
La Révolution française marque une césure politique, morale, esthétique et philosophique, dont le roman français porte l’empreinte. Sénac de Meilhan, auteur de L’Emigré (1797), est le premier à en mesurer l’importance : les critères de vraisemblance qui jusqu’alors avaient cours, subissent un complet bouleversement. Avec la Révolution, l’extraordinaire devient commun. La place nouvelle de l’histoire, dans l’horizon philosophique et politique, transforme le genre en profondeur. Si le « roman historique » français naît dans les années 1820 sous l’impulsion des traductions de Walter Scott, il faut en faire remonter la genèse à la fin du XVIIIe siècle et aux premières années du siècle suivant. De L’Emigré au Chevalier de Maison-Rouge, en passant par Delphine ou Les Chouans, nombreux sont les romans qui prennent les événements révolutionnaires pour cadre ou matière de leur intrigue. Comment les romanciers entre 1797 et 1846 se sont-ils approprié cette période de l’histoire ? Quel sens lui donnent-ils respectivement ? Selon quelle articulation ce passé devient-il une « pré-histoire du présent » (G. Lukacs) ? Voilà quelques-unes des questions que nous nous posons, dans un travail qui est autant une contribution à l’étude du roman historique qu’une réflexion sur la représentation du temps historique dans la fiction narrative. Mots-clefs : roman, Révolution française, roman historique, Sénac de Meilhan, Alexandre Dumas, Germaine de Staël, Honoré de Balzac.
Tong Yu
En 1913, au moment où André Gide achève la rédaction des Caves du Vatican, œuvre romanesque d’un nouveau type, qu’il choisira finalement de désigner comme une « sotie », Jacques Rivière publie pour sa part son essai sur Le Roman d’aventure, où il définit l’aventure comme « ce qui advient, c’est-à-dire ce qui s’ajoute, ce qui arrive par-dessus le marché, ce qu’on n’attendait pas, ce dont on aurait pu se passer », et le « roman d’aventure » lui-même comme le « récit d’événements qui ne sont pas contenus les uns dans les autres ». Cette notion d’aventure apparaît ainsi comme une notion à la fois structurante et éclairante pour approcher l’œuvre de Gide en général, mais aussi ses choix et ses engagements dans sa vie comme dans son œuvre, au plan éthique comme au plan esthétique, bien au-delà de la période d’écriture des Caves du Vatican. Cette notion permet en effet de rendre compte d’un cheminement éthique et de la réflexion philosophique menée par Gide autour des notions de liberté, de nécessité, de contingence, de curiosité, de disponibilité, des Nourritures terrestres jusqu’au Voyage au Congo en passant par Paludes et Le Prométhée mal enchaîné. Elle permet aussi de bien comprendre la logique qui conduit Gide à renouveler l’écriture romanesque, d’un livre à l’autre, pour passer des « récits » et des « soties », au tournant du XIXe siècle et du XXe, aux Faux-monnayeurs, le seul de ses livres que l’écrivain a assumé de présenter comme un « roman ».
Arlette Kifungwasi
M. HALEN Pierre - PR - Université de Lorraine - Directeur de these
M. D’HULST Lievin - Professeur - KU-Leuven - CoDirecteur de these
M. DIOP Papa Samba - Professeur émérite - PREM Université de Paris-Est Créteil - Rapporteur
M. MBONDOBARI Sylvère - MC HDR - Université Omar Bongo, Libreville - Rapporteur
Mme RANAIVOSON Dominique - MCF HDR - Université de Lorraine - Examinateur
M. WINIBERT Segers - Professeur - KU-LEUVEN - Examinateur
L’objet de notre recherche est, d’un point de vue linguistique et littéraire, la dynamique des échanges interculturels dans les œuvres de Paul Lomami-Tshibamba et d’Henri Lopes, originaires des deux rives du fleuve Congo, marqués par des mélanges linguistiques, à l’oral comme à l’écrit. Le bilinguisme y est dépassé par diverses formes d’hétérolinguisme.
Notre étude comparative s’intéresse à la toponymie référentielle et aux traces des cultures locales dans la narration. Nous étudions les phénomènes linguistiques perceptibles dans la morphologie lexicale et les structures syntaxiques, afin d’analyser les enjeux de l’hétérolinguisme et de l’interculturalité. Notre étude porte aussi sur l’hybridité narrative, les postures identitaires et sur le métissage culturel des personnages. La spécificité de notre étude réside dans sa problématique jusque-là non étudiée chez nos auteurs : celle de l’interculturalité et du bilinguisme.
Notre recherche veut répondre aux questions ci-après : Quels usages font les écrivains francophones africains de la langue française et des langues locales ? Quelles marques linguistiques caractérisent Ngando de Lomami-Tshibamba ou Pleurer-rire de Lopes ? Quel est l’enjeu de la tropicalisation du français observée dans les œuvres choisies ?
La sociolinguistique, nous permettra d’expliquer et de décrire les variations dans l’usage de la langue, le recours à la lexicologie nous aidera à dégager la signification des mots, leurs fonctions et leurs relations dans la langue.
Domaine de recherche, publications :
Agrégée d’espagnol depuis 1993. Thèse de Doctorat L’univers romanesque de Luis Mateo Díez : un territoire littéraire, soutenue en décembre 2001, à l’Université de Tours. HDR soutenue en septembre 2015 « Le roman espagnol contemporain : entre fiction et autofiction », avec un inédit intitulé Antonio Soler : de l’empreinte sensorielle à l’identité narrative. Maître de conférences à l’Université Paul Verlaine de Metz, puis à l’Université de Lorraine depuis septembre 2006.
Joëlle Fabiola Nsa Ndo
Jean-Michel WITTMANN | Professeur des universités | Université de lorraine | Directeur de thèse | |||
Sylvie FREYERMUTH | Professeur des universités-Université du Luxembourg | Université de Luxembourg | Rapporteur | |||
Than-Van TON-THAT | Professeur des universités-Université Paris Est Créteil | Université de Paris Creteil | Rapporteur | |||
Pierre HALEN | Professeur des universités | Université de Lorraine | Examinateur |
Le groupe et sa représentation dans la littérature autour de 1900 : Enjeux politiques et esthétiques » Dans le contexte de la Belle Époque, nombreux sont les romanciers qui s’attachent à représenter des « groupes », de forme et d’ampleur très diverses. Cette représentation du groupe engage des enjeux d’ordre moral mais aussi, et plus encore, des enjeux politiques. À travers le groupe, la question posée est celle de l’individu dans son rapport avec la société, voire avec la Nation. Dans cette période dominée par une volonté générale de réagir contre la décadence, cette question est celle de l’individualisme, analysé et présenté comme une maladie et comme le facteur même de la décomposition du corps social par Bourget, dès 1881, dans sa « Théorie de la décadence ». La question est d’ordre moral dans la mesure où elle concerne les devoirs de l’individu ; elle est aussi d’ordre politique, dans la mesure où elle concerne la bonne marche de la société, voire la bonne santé de la Nation. Elle est enfin d’ordre esthétique, à la fois parce que la problématique de la décadence de l’œuvre littéraire et celle de la décadence du corps social sont indissociables, suivant la vision organiciste de Bourget dans sa « Théorie de la décadence », et parce que le rapport entre l’individu et le groupe, en renvoyant au lien qui unit le romancier à son public, mais aussi à des groupes littéraires ou des réseaux d’influence, engage une certaine vision de la littérature. Cette thèse vise ainsi rendre compte de ces réflexions à partir, non pas des prises de position des uns et des autres, mais bien de la représentation du groupe proposée à l’intérieur même des fictions romanesques. Dans cette perspective, la réflexion se focalisera plus particulièrement sur quelques romans qui ont en commun de représenter différentes formes de groupes, notamment Paludes et Les Caves du Vatican d’André Gide, Les Déracinés de Maurice Barrès, L’Étape de Paul Bourget, Le Soleil des morts de Camille Mauclair et L’Enfant chargé de chaînes de François Mauriac. Mots-clefs : roman – Belle Époque – décadence – individualisme – politique – morale.